Centrales nucléaires et environnement

A l’heure où d’aucuns succombent aux sirènes du thuriféraire de l’atome, Jean-Marc Jancovici, il est utile de rappeler quelques idées simples au sujet de la filière électronucléaire. Sa fragilité ne saurait se résumer aux seuls risques de l’usage de substances radioactives. Elle est la résultante d’un procès de production qui implique l’usage d’une grande diversité de substances chimiques pour le moins dangereuses[1]. Chose souvent méconnue, les centrales nucléaires disposent ainsi du droit d’entreposer de grandes quantités d’effluents et surtout de les rejeter dans le milieu naturel.

L’exploitation de la filière nucléaire expose ainsi l’environnement chaque jour à des impacts « non nuls » qu’il est de plus en plus difficile de négliger au vu des résultats des recherches les plus récentes. Après une décennie de débat autour du tritium[2], plus personne aujourd’hui ne considère que l’exposition à des faibles doses sur la durée est sans conséquence[3]. La justice reconnaît ce problème depuis de nombreuses années et les condamnations d’EDF sont de plus en plus nombreuses puisqu’en dernier recours l’exploitation des centrales met en cause l’objectif de restauration du bon état écologique du milieu aquatique[4]. Par leurs rejets les centrales nucléaires disséminent dans l’environnement non seulement des radionucléides pour la plupart artificiels mais aussi des polluants chimiques sans oublier bien évidemment les effets thermiques qui en cette période de canicule justifient la mise à l’arrêt de nombreuses tranches.

La Normandie avec 8 réacteurs nucléaires en exploitation et l’usine de traitement des combustibles usés de La Hague est un parfait exemple pour observer quels sont les impacts du nucléaire sur l’environnement, les quantifier et surtout envisager comment ils pourraient être réduits si l’exploitant mettait en œuvre les meilleures techniques disponibles.

Une réalité reconnue par l’exploitant et admise par l’Etat...

A en croire le document d’EDF cité en introduction :

« Les rejets liquides de substances chimiques sont classés en deux catégories : les rejets de substances chimiques associées aux effluents radioactifs liquides et aux eaux d’exhaure non radioactives des salles des machines, les rejets de produits issus des autres circuits non nucléaires (circuit de refroidissement des condenseurs, station de déminéralisation, station d’épuration, …). Dans la première catégorie de rejet, on trouve l’acide borique servant au pilotage du réacteur ainsi que les produits de conditionnement utilisés pour éviter la corrosion des circuits primaire, secondaire et de réfrigération des circuits auxiliaires (hydrazine, lithine, morpholine, éthanolamine, ammoniaque, phosphate). La seconde catégorie de rejet concerne principalement les substances issues du traitement de lutte contre le tartre (sulfates, chlorures, polyacrylate) ou contre le développement d’organismes vivants (produits biocides) dans les circuits de refroidissement des condenseurs. Des traitements à l’eau de Javel sont pratiqués afin d’éviter l’encrassement des circuits par des organismes fixés (algues, moules…). La monochloramine est utilisée pour éliminer les germes pathogènes. Pour les centrales nucléaires équipées de condenseurs dont les tubes sont en laiton (alliage de cuivre et de zinc), l’usure des tubes par érosion-corrosion donne lieu à des rejets de cuivre et de zinc (cf. tab. III). »

Ces rejets sont strictement réglementés par un document cadre que l’on a coutume de désigner par l’expression « D.A.R.P.E. ». Les autorisations dont bénéficie la centrale font suite à une Demande d’autorisation de prélèvements d’eau instruite en application de la réglementation en vigueur en particulier du Décret n°95-540 du 4 mai 1995 relatif aux rejets d'effluents liquides et gazeux et aux prélèvements d'eau des installations nucléaires de base[5]. Ainsi sommes nous bien en présence de rejets autorisés non nuls justifiés par la nécessité d’exploitation :

« L’impact des rejets radioactifs sur le public est déterminé par le calcul de la dose efficace pour les personnes susceptibles d’être les plus exposées aux rejets (cf. chapitre 8 §4.1). Dès lors que la dose efficace, exprimée en millisievert (mSv), est inférieure aux limites fixées par la réglementation et que, par ailleurs, l’exploitant montre qu’il a réduit ce niveau de dose aussi bas que raisonnablement possible en vertu du principe d’optimisation, l’ensemble de la population est considéré comme protégée. »

Conformément aux principes édictés par le Code de l’environnement, l’exploitant doit mettre en œuvre des mesures conservatoires pour limiter ces rejets « dans des conditions économiquement acceptables » en prenant soin de mettre en œuvre les « meilleures techniques disponibles ». On parle d’optimisation :

« Les actions d’optimisation consistent prioritairement à réduire, à la source, la production d’effluents partant du principe que le « meilleur effluent est celui qu’on ne produit pas ». La collecte sélective et le traitement approprié des effluents en vue de leur recyclage éventuel viennent compléter le dispositif visant la réduction des rejets . »

En cela la réglementation applicable aux installations nucléaires de base rejoint celle relative aux ICPE et autres IOTA[6]. Ainsi doit on reconnaître que les rejets des centrales ont considérablement diminué en 40 ans. « S’agissant des rejets radioactifs liquides hors tritium et carbone 14, ceux-ci ont été réduits d’un facteur 100 entre 1985 et 2000 et les rejets radioactifs gazeux (gaz rares) ont été divisés par 10 depuis les années 1980. » Mais ont est loin du « niveau plancher » que l’exploitant prétend avoir atteint considérant que « le tritium et le carbone 14, faiblement radiotoxiques, dont on mesure la présence à l’état de traces dans les zones influencées par les rejets. »

L’exemple de la centrale de Paluel en Seine-Maritime

Le 9 Juillet 2019, l’Autorité de sûreté nucléaire a fixé les prescriptions relatives aux modalités de prélèvement et de consommation d’eau, de rejet d’effluents et de surveillance de l’environnement de la centrale de Paluel[7].

Cette décision fait à la suite d’un long travail d’instruction avec le concours de la commission locale d’information[8] a donné lieu à un avis du Coderst de Seine-Maritime et à une consultation du public en 2017[9] à l’occasion de laquelle les associations se sont exprimées [10].

Si des réductions notables de certains rejets ont été acquis notamment grâce à l’abandon des usages les plus massifs de l’ammoniaque, il n’en reste pas moins que la centrale déverse en toujours en mer un fleuve de toxiques dont EDF peine à minorer les impacts sur le milieu aquatique et les espèces.

Et on touche là à un problème de fond, à savoir les conséquences cumulées de trente années d’exploitation nucléaire. Il aura fallu attendre 2012 pour disposer d’un document établi par des experts officiels pour obtenir une évaluation des effets des rejets thermiques en mer depuis le début de l’exploitation[11]. Mais nous ne disposons toujours pas à ce jour d’étude qui permettent d’évaluer les autres effets et impacts cumulés. Tout au plus nous disposons d’une information au fil de l’eau qui se contente d’indiquer que la centrale reste globalement dans les « enveloppes » autorisées… c’est-à-dire que les rejets seraient maîtrisés. Proposition audacieuse s’il en est puisqu’il faut bien reconnaître que les centrales nous exposent à des fuites et à des rejets en pagaille[12].

Des rejets massifs et diversifiés à Penly

L’exemple de la centrale de Penly prouve les difficultés que rencontre l’exploitant pour maitriser son exploitation et respecter ses engagements vis-à-vis de l’Etat. L’avis de l’ASN pour 2019 l’atteste.

« En matière de protection de l’environnement, l’ASN constate des progrès significatifs concernant la gestion des gaz appauvrissant la couche d’ozone. Des lacunes ont cependant été notées concernant la maîtrise de la réglementation relative à la gestion des déchets. Toutefois, l’ASN souligne la qualité d’exploitation de la station d’épuration. Les contrôles effectués en matière de sécurité des travailleurs mettent en évidence des lacunes dans la prévention des risques chimiques au sein des installations en fonctionnement, et des risques électriques et du travail en hauteur au niveau des chantiers de construction, notamment celui des groupes électrogènes à moteur diesel d’ultime secours[13]. »

Dans le rapport annuel d’information du public publié chaque année, EDF désigne comme « inconvénients » les rejets opérés par l’exploitation du site. Si l’exploitant présente la grande diversité des substances disséminées, il ne dit pas grand-chose sur les quantités effectivement rejetées :

« Les rejets chimiques sont composés par les produits utilisés dans l’eau des circuits, selon des paramètres physiques et chimiques requis pour obtenir un bon fonctionnement des installations. Sont utilisés :

l’acide borique, pour sa propriété d’absorbeur de neutrons grâce au bore qu’il contient. Cette propriété du bore permet de contrôler le taux de fission du combustible nucléaire et, par conséquent, la réactivité du cœur du réacteur ;

  1. la lithine (ou hydroxyde de lithium) pour maintenir le pH optimal de l’eau du circuit primaire ;

  2. l’hydrazine pour le conditionnement chimique de l’eau du circuit secondaire. Ce produit permet d’éliminer les traces d’oxygène, de limiter les phénomènes de corrosion et d’adapter le pH de l’eau du circuit secondaire. L’hydrazine est aussi utilisée avant la divergence des réacteurs pour évacuer une partie de l’oxygène dissous de l’eau du circuit primaire ;

  3. la morpholine ou l’éthalonamine permettent de protéger contre la corrosion les matériels du circuit secondaire ;

  4. le phosphate pour le conditionnement des circuits auxiliaires des circuits primaire et secondaire ; l’ammoniaque pour entretenir les tuyauteries du circuit secondaire ;

  5. l’hexafluorure de soufre pour ses qualités d’isolant ; il est utilisé dans certains matériels électriques sous haute tension.

Certains traitements génèrent, directement ou indirectement, la formation d’azote, d’hydrogène et d’ammoniaque, que l’on retrouve dans les rejets sous forme d’ions ammonium, de nitrates et de nitrites.

La production d’eau déminéralisée et/ou les opérations de chloration conduisent à des rejets de :

  • sodium ;

  • chlorures ;

  • sulfates ;

  • AOX, composés organohalogénés utilisés pour les traitements de lutte contre les micro-organismes (traitements biocides) des circuits. Les organohalogénés forment un groupe constitué de substances organiques (c’est-à-dire contenant du carbone) qui comprend plusieurs atomes d’halogènes (chlore, fluor, brome ou iode). Ceux qui contiennent du chlore sont appelés « composés organochlorés » ;

  • THM ou trihalométhanes, auxquels appartient le chloroforme. Ils résultent des traitements biocides des circuits. Les trihalogénométhanes sont un groupe important et prédominant de sous-produits chlorés de désinfection de l’eau potable. Ils peuvent résulter de la réaction entre les matières organiques naturelles présentes dans l’eau et le chlore ajouté comme désinfectant.[14] »

Toutes les limites indiquées dans ces tableaux sont issues des décisions n°2008-DC-0089 et 2008-DC-0090 de l’ASN en date du 10 janvier 2008 relatives à l’autorisation de rejet des effluents radioactifs liquides par le site de Penly. Ces critères liés à la concentration et au débit ont tous été respectés en 2019. Pour autant on est en droit de s’interroger comme le fait WISE-Paris dans cette étude relative aux rejets de la centrale de Cattenom sur la pertinence des « enveloppes » accordées à l’exploitant[15]. Les quantités autorisées sont si importantes qu’il n’est pas trop difficile pour EDF de « rester dans les clous ». Une appréciation plus rigoureuse des impacts sanitaires et environnementaux des substances émises par les centrales comme le suggère l’ACRO amènerait à revoir des autorisations pour le moins généreuses. Surtout quand on regarde les volumes disséminés :

« À l’exception des eaux de pluie collectées par certains émissaires, tous les effluents, qu’ils soient radioactifs ou non, sont orientés vers un ouvrage de rejet unique qui constitue le rejet principal du site Par l’ouvrage de rejet principal, sont rejetées les substances chimiques en provenance :

  • des vidanges des réservoirs T (capacité unitaire 500 à 750 m3) collectant les effluents radioactifs (10 à 15 vidanges par an et par réacteur). Ces réservoirs contiennent, en plus des substances radioactives, des substances chimiques telles que :

  • acide borique, lithine, hydrate d’hydrazine, phosphates, détergents provenant du lavage du linge contaminé ou des douches,

  • les produits de conditionnement du circuit secondaire (morpholine, hydrazine, ammoniaque, le cas échéant de l’éthanolamine et leurs dérivés azotés tels que nitrates et nitrites) si les réservoirs ont collecté les purges des générateurs de vapeur,

  • les matières en suspension (boues) voire quelques métaux à l’état de trace dus à l’usure des circuits,

  • des vidanges des réservoirs Ex, (capacité unitaire 300 à 1000 m3) collectant les eaux d’exhaure des salles des machines (50 à 100 vidanges par an et par réacteur). Ces réservoirs renferment essentiellement :

  • les produits de conditionnement du circuit secondaire et du circuit de production de vapeur auxiliaire (morpholine, hydrazine, ammoniaque, le cas échéant de l’éthanolamine, et leurs dérivés azotés tels que nitrates et nitrites),

  • les matières en suspension (issues de la récupération des eaux brutes de désurchauffe des fonds « basse-pression » des turbines) voire quelques métaux à l’état de trace dus à l’usure des circuits,

  • les phosphates issus des vidanges des circuits de refroidissement intermédiaire. »

Une réglementation plus exigeante qui pour autant ne modifie guère les pratiques

Depuis la catastrophe de Fukushima, la réglementation applicables aux installations nucléaires de base a été considérablement renforcée[16] avec un renforcement indéniable des règles limitant les rejets et impacts[17]. Pour autant rien n’a profondément changé dans les centrales depuis quarante ans. La même stratégie de gestion des effluents demeure et les mêmes équipements sont encore utilisés. Pour ne prendre que cet exemple, le traitement antitartre et bactériologiques des circuits d’alimentation en source froide utilise des quantités pharaoniques de polluants à la mesure des prélèvements réalisés pour la maitrise de l’exploitation…

EDF se trouve dans l’obligation de recueillir et de traiter une grande diversité de polluants chimiques et radioactifs utilisés tout au long du procès. Il s’agit tout d’abord de substances utilisées pour le contrôle de la réaction nucléaire (acide borique) ou pour le conditionnement chimique des circuits afin de les protéger de la corrosion (lithine, hydrazine, morpholine, ammoniaque, éthanolamine, phosphates, …). Ensuite de substances issues du traitement antitartre des circuits de refroidissement (sulfates, chlorures, polyacrylates) et des sous-produits issus du traitement biocide (oxydants résiduels, nitrates, nitrites, AOX1, THM2 pour les sites en bord de rivière ; oxydants résiduels et substances organohalogénées-bromées pour les sites en bord de mer). À cela s’ajoutent, pour certaines centrales, les rejets de cuivre et de zinc dus à l’usure des tubes en laiton des condenseurs. Joli cocktail s’il en est…

A en croire EDF, « les centrales nucléaires sont conçues pour permettre une collecte sélective des effluents. Celle-ci permet de séparer les effluents selon leur origine et leur composition afin d’adapter le mode de traitement à leurs caractéristiques. Après collecte et traitement éventuel, les effluents sont analysés avant d’être rejetés dans l’environnement selon des règles défi nies par la réglementation. »

Ainsi peut-on retrouver des traces de produits de fission tels que les iodes 131 et 133, les césiums 134 et 137, le krypton 85, le tritium, le carbone 14, le strontium 90 et surtout des produits d’activation dont les principaux sont les cobalts 58 et 60, le manganèse 54, le l’antimoine 124, l’argent 110m mais aussi le tritium et le carbone 14, dans les effluents liquides collectés dans la centrale. Ces effluents sont essentiellement produits en phase d’exploitation du fait des mouvements d’eau primaire effectués lors des variations de puissance ou de l’ajustement des paramètres chimiques de l’eau du réacteur…). On les désigne pudiquement comme « effluents primaires hydrogénés ». S’y ajoutent les effluents issus des circuits auxiliaires dits « effluents usés » qui résultent principalement des opérations de maintenance nécessitant des vidanges de circuit (filtres, déminéraliseurs, échangeurs…), des opérations d’évacuation du combustible usé et de conditionnement des résines usées, des actions de maintien de la propreté des installations (lavage du sol et du linge). Sans parler des rejets atmosphériques, autre gros dossier...

Tout cela peut sembler très robuste et sérieux. Loin s’en faut. Une centrale nucléaire est une installation fragile qui fuit de partout et où final l’exploitant ne maîtrise pas grand-chose. Tout au plus les substances dangereuses sont captées par des filtres qui deviennent des déchets radioactifs pour le moins sensibles dont l’usage et la maintenance sont des plus problématiques[18]…

Un contrôle de la gestion des effluents pour le moins accablant

Si le code de l’environnement donne compétence à l’ASN pour édicter les prescriptions relatives aux prélèvements d’eau et aux rejets d’effluents des INB, il lui confie le contrôle des équipements et autres dispositifs relatifs à la maîtrise des impacts sur l’environnement. Le bilan de cette mission n’est pas neutre tant sur le plan quantitatif : … que qualitatif :

« L’ASN a mené, en 2019, des inspections relatives à la maîtrise des nuisances et de l’impact des centrales nucléaires sur l’environnement, portant principalement sur la prévention des pollutions et des nuisances, la maîtrise des rejets dans l’environnement et la gestion des déchets. Les centrales nucléaires de Paluel, Penly et Flamanville – y compris le réacteur EPR – ont fait l’objet d’une inspection renforcée sur ces thèmes. L’organisation d’EDF en matière de maîtrise des nuisances et de l’impact des centrales nucléaires sur l’environnement doit être améliorée sur la plupart des sites et l’ASN considère que l’exploitant doit encore accroître sa vigilance sur cette thématique. Si l’ASN constate des avancées pour la réalisation des analyses méthodiques des risques microbiologiques et une meilleure appropriation par les sites des exigences de la décision encadrant ces risques, l’ASN estime que des actions correctives doivent être menées sur la gestion des déchets et la prévention des pollutions.[19] »

Les événements conduisant à des déversements de substances dangereuses ont été à nouveau trop nombreux en 2019. Si ces situations n’ont pas conduit à des « impacts notables » sur l’environnement, elles soulignent la nécessité pour l’exploitant de poursuivre le renforcement de ses efforts dans ce domaine.

Urgence pour l’exploitant de recourir aux meilleures pratiques

Après quatre décennies d’exploitation au cours desquelles EDF a essayé de mille façons à déroger au droit commun[20], il est grand temps de mettre un terme à une gestion des effluents d’autant plus préoccupantes qu’elle n’a jamais donné lieu à un bilan des effets au regard des états initiaux constatés.

Voilà pourquoi, nous portons plainte aujourd’hui. Il ne s’agit en aucun cas d’une action irréfléchie qui aurait pour seul but de gêner l’exploitant nucléaire. Notre objectif au regard du constat établi par l’autorité de contrôle est d’amener les pouvoirs publics à exiger un changement profond de la gestion des effluents liquides et gazeux :

L’inspection menée les 4 et 5 juin 2019 par l’ASN à Flamanville révèle en effet des failles et des mauvaises pratiques qui donnent à voir une maîtrise très insuffisante de la surveillance et de la gestion des effluents par la direction de ce CNPE :

« Les inspecteurs de l’ASN ont noté que le sous-processus d’analyse de la conformité règlementaire apparait perfectible. L’inspection et notamment l’exercice portant sur la thématique du confinement liquide a mis en évidence des lacunes dans la stratégie de confinement du site.

L’inspection portant sur la thématique des risques non radiologiques a mis en évidence l’absence d’une mesure de maîtrise de risque prise en compte dans la démonstration de sûreté nucléaire. L’ASN a demandé à l’exploitant de prendre les dispositions nécessaires pour remédier à ces situations qu’elle juge préoccupantes et ce, le plus rapidement possible.

L’inspection portant sur la thématique des rejets et de la surveillance de l’environnement souligne l’importance de mettre en œuvre des actions de surveillance sur les entreprises extérieures en charge de la maintenance ou de l’exploitation de certaines installations.

Pour conclure, l’inspection révèle une organisation en matière d’environnement, ainsi que son déploiement, perfectibles sur chacune des thématiques contrôlées. »

Non seulement la surveillance était pour le moins perfectible mais l’attribution de cette mission à une entreprise sous-traitante ne sont pas acceptables. Les activités importantes pour la protection devraient être exercée directement par EDF au regard de ses responsabilités d’exploitant nucléaire. Plus fondamentalement, nous déplorons l’état général des dispositifs visant à recueillir des effluents liquides en particuliers de puisards, problème récurent sur tout le parc nucléaire comme l’avait donné à voir la pollution de la nappe à Penly en 2013[21].

Puisque l’exploitant nucléaire persiste à recourir à la sous-traitance aux dépends de la sûreté et de la radioprotection comme l’a établi le rapport parlementaire présenté par Barbara Pompili en 2018[22], qu’il ne corrige pas les erreurs et irrégularités constatées par l’Autorité de contrôle et surtout qu’il ne propose pas une révision complète de ses pratiques au regard des meilleures pratiques qui existent dans d’autres pays[23], nous considérons qu’il est utile de porter l’affaire devant la justice pour exiger qu’Edf reconnaisse le droit de tou(te)s à vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.

Notes et commentaires

[1] La plupart des illustrations de cet article sont tirés de ce document qui demeure une référence quel qu'en soit l'auteur :*

https://www.edf.fr/sites/default/files/contrib/groupe-edf/producteur-industriel/nucleaire/enjeux/environnement/gestion-de-l-eau/centrales_nucleaires_et_environnement_-_rejets_deau_light.pdf

[2] https://www.asn.fr/sites/tritium/files/assets/common/downloads/publication.pdf

[3] https://www.irsn.fr/FR/connaissances/Nucleaire_et_societe/expertise-pluraliste/IRSN-ANCCLI/Pages/23-Seminaire-Radioactivite-Sante_Mars-2018.aspx?#.X0AH1cgzaiM

[4] https://www.eaufrance.fr/regles-devaluation-de-letat-des-eaux#:~:text=La%20DCE%20d%C3%A9finit%20le%20%22bon,%C3%A0%20cette%20masse%20d'eau

[5] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000005618534&dateTexte=20190720

[6] https://aida.ineris.fr/node/146

[7] Décision n°2019-DC-0677 de l’Autorité de sûreté nucléaire du 9 juillet 2019

https://www.asn.fr/Reglementer/Bulletin-officiel-de-l-ASN/Installations-nucleaires/Decisions-individuelles/Decision-n-2019-DC-0676-de-l-ASN-du-9-juillet-2019

Décision qui a donné lieu à un arrêté ministériel publié en août 2019 :

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000039001520&dateTexte=&categorieLien=id

[8] https://www.clin76.fr/wp-content/uploads/2017/08/Relev%c3%a9-de-d%c3%a9cisions-commission-technique-06avril2017-int%c3%a9gration-des-remarques-de-Mme-GAZAL.pdf

[9] https://www.asn.fr/Reglementer/Participation-du-public/Installations-nucleaires-et-transport-de-substances-radioactives/Archives-des-participations-du-public/Centrale-nucleaire-de-Paluel

[10] http://stopeprpenly.org/?p=1006

[11] https://www.ifremer.fr/sextant_doc/dcsmm/documents/Evaluation_initiale/MMN/PI/MMN_PI_12_Modification_regime_thermique.pdf

[12] https://www.sortirdunucleaire.org/rejets-centrales-nucleaires

[13] https://www.asn.fr/L-ASN/L-ASN-en-region/Normandie/Installations-nucleaires/Centrale-nucleaire-de-Penly

[14] https://www.edf.fr/sites/default/files/contrib/groupe-edf/producteur-industriel/carte-des-implantations/centrale-penly/surete-et-environnement/rapport_penly_2020_bd.pdf

[15] http://www.wise-paris.org/francais/rapports/notes/031017NoteAddEP-Cattenom.pdf

[16] Arrêté du 7 février 2012

https://www.asn.fr/Reglementer/Cadre-legislatif/Arretes/Arrete-du-7-fevrier-2012-fixant-les-regles-generales-relatives-aux-INB

Loi de transition énergétique

https://www.asn.fr/Reglementer/La-reglementation/Le-cadre-general-de-la-legislation-et-de-la-reglementation-des-activites-nucleaires/La-loi-TECV

Ordonnance relative au contrôle

https://www.asn.fr/Informer/Actualites/Ordonnance-relative-au-controle-des-installations-nucleaires

[17] https://www.asn.fr/Informer/Dossiers-pedagogiques/La-surete-des-centrales-nucleaires/Radioprotection-et-protection-de-l-environnement/Les-rejets

[18] https://www.sortirdunucleaire.org/La-farce-cachee-du-nucleaire-en-bref

[19] https://www.asn.fr/Informer/Publications/Rapports-de-l-ASN/La-surete-nucleaire-et-la-radioprotection-en-France-en-2019#10

[20] https://blogs.mediapart.fr/guillaume-blavette/blog/100516/nucleaire-crepuscule-d-une-industrie-qui-s-est-longtemps-crue-au-dessus-des-lois

[21] http://stopeprpenly.org/?p=285

Fait confirmé par le rapport de sûreté publié par l’exploitant

https://www.clin76.fr/wp-content/uploads/2014/07/rapport-2013-surete-radioprotection-CNPE-de-Penly.pdf

[22] http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cenucl/l15b1122-ti_rapport-enquete

[23] En aval de la gestion des effluents se pose en particulier le problème de la purge des réservoirs de collecte des effluents et lors des arrêts de tranche des citernes recueillant les liquides de nettoyage des circuits. En Belgique comme au Canada ces purges sont plus strictement encadrées de manière à préserver les milieux.

Pour la Belgique, consultez le site de l'AFCN : https://afcn.fgov.be/fr/dossiers/radioactivite-dans-lenvironnement/surveillance-radiologique-du-territoire-belge/rejets

Celui de la CCSN pour le canada : http://nuclearsafety.gc.ca/fra/resources/emergency-management-and-safety/managing-radioactive-releases.cfm#sec2